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Ils subissent les contrecoups de la pandémie depuis mars dernier

Collège de Valleyfield: les profs à bout de souffle demandent l’intervention de la direction

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16 décembre 2020
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Marie-Claude Pilon
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Par Marie-Claude Pilon, Journaliste

Depuis le début de la pandémie, de nombreux acteurs oeuvrant dans le secteur de l’enseignement au primaire et au secondaire ont pris la parole. Mais, très peu d’intervenants se sont exprimés au niveau collégial. Comment se sentent les enseignants? Comment vivent-ils ce moment particulier? Deux mots peuvent résumer leur état d’esprit: fatigue et découragement. C’est ce que soutient le Syndicat des enseignantes et des enseignants du Collège de Valleyfield.

Le 27 octobre dernier, la présidente de cette entité syndicale, Chantal Malouin, s’est adressée au conseil d’administration de l’établissement collégial. L’objectif? Demander au CA son soutien parce qu’une grande majorité de ses collègues vivent difficilement la situation actuelle, en enseignement à distance ou en mode hybride et sont à bout de souffle en cette année particulière.

« En mars dernier, nous avons dû arrêter la session d’hiver 2020 de façon abrupte
après que le gouvernement ait annoncé un confinement complet. Du 13 au 27 mars, les enseignants ont travaillé à vitesse grand V pour apporter, dans l’urgence de la situation, les modifications nécessaires afin d’adapter leurs cours pour passer en enseignement à distance. Nous avons eu une fin de session toute croche, on a fait ce qu’on a pu pour sauver la session. La session d’automne est toute aussi cahoteuse avec un enseignement hybride pour certains programmes ou 100% en ligne pour d’autres. Certains n’ont pas mis les pieds dans le Collège depuis neuf mois! 
», image-t-elle.

Un enseignement hybride ou virtuel à 100%

Les enseignants qui forment les élèves dans des domaines plus techniques, tels que chimie analytique, soins infirmiers ou génie mécanique, offrent un enseignement hybride. En quoi cela consiste-t-il? À être présent une certaine portion du temps, alors que l’autre portion des classes sont enseignées en ligne via différents logiciels.

Si l’enseignement à distance comporte quelques avantages, comme celui de ne pas affronter la circulation, ce mode virtuel comporte aussi de nombreux désavantages. « Plusieurs de mes collègues déplorent le fait qu’ils enseignent toute la journée à des écrans noirs, car les élèves ne sont pas tenus d’allumer leur webcam lors des cours. Imaginez, pendant six heures parfois, ils sont derrière un écran sans avoir de rétroaction directe des élèves. On ne sait pas s’ils sont à l’écoute. On ne sait pas non plus si c’est réellement l’étudiant qui suit le cours, on ne sait même pas si c’est lui qui rédige le test ! Et ça, c’est sans parler du fait que certains enseignants sont encore en mode d’apprentissage des différentes plateformes d’enseignement », ajoute-t-elle.

Qui dit travail à domicile ou à distance dit aussi aléas de la vie. Panne de courant,
panne d’Internet, panne du logiciel d’enseignement, enfant malade, conjoint aussi
en télétravail, les imprévus peuvent aussi s’ajouter et compliquer la tâche des
enseignants.

« Plusieurs mythes circulent quant au métier de prof, mais croyez-moi, rien n’est
vrai. Pensez-vous que nous aurons des vacances pendant le temps des Fêtes?
Aucunement, parce qu’on doit corriger les travaux des élèves et c’est pas mal plus
long de corriger sur un ordinateur que sur papier. En plus, nous devons préparer la prochaine session qui sera aussi virtuelle. Pour certains profs, cela double, triple ou même quadruple leurs tâches.
 »

Encadrer les étudiants en virtuel et individuellement

Mais qu’en est-il de l’encadrement des élèves? « L’encadrement s’est énormément
alourdi. Un prof peut avoir jusqu’à 4 groupes de 35 élèves…donc 140 étudiants, parfois plus. Si le tiers ne comprend pas, ça fait cinquante courriels à recevoir pour prendre rendez-vous sur Zoom pour réexpliquer les notions encore et encore, et ce à chaque semaine. Les élèves sont rendus des ZOOMbies à force d’être devant un écran à longueur de temps, ils ont de plus en plus de difficulté à demeurer concentrés. Et comment s’assurer qu’ils ne copient pas lors des évaluations? Un prof peut faire cinq ou six versions du même examen pour éviter le plagiat le plus possible, mais on ne peut jamais être certain. On veut aussi être équitable envers tous les étudiants et en multipliant les évaluations, ça aide
, mais c’est pas mal plus de correction », confie-t-elle.

Tous ces facteurs et bien d’autres contribuent, selon Mme Malouin, à épuiser et à décourager les enseignants qui sont à bout de souffle. À la mi- octobre, un sondage tenu auprès de 2300 enseignants au niveau collégial, dont 75 enseignent au Collège de Valleyfield a révélé ceci:

- 48 vivent un taux de détresse psychologique élevé selon le test de Kysler;
- 25 ressentent une importante détresse, toujours selon le même test;
- 2 ont eu un résultat normal;

« Ce sondage a été fait il y a maintenant quelques semaines. C’est certain que
l’état de plusieurs a empiré depuis. L’objectif de notre intervention auprès du CA
était de leur faire part de ces résultats, mais aussi de leur demander d’intervenir.
Ils ont le pouvoir et le devoir de le faire. »

Embaucher de nouvelles ressources pour l’hiver

Concrètement, la demande du syndicat à la direction du Collège de Valleyfield se
divise en deux volets. Le premier est de payer le matériel nécessaire à l’enseignement à domicile comme le papier d’imprimante, les crayons, les casques
audios et autres.

Le second, et c’est à sujet que Mme Malouin a interpelé le conseil d’administration, concerne l’ampleur de la surcharge de travail actuelle des enseignants. Bref, le délestage de tâche ou l’embauche de nouvelles ressources. « On a besoin de temps pour préparer nos cours, réadapter notre contenu pour l’enseignement virtuel, encadrer et évaluer nos étudiants. Mais on a aussi besoin de plus de temps qu’habituellement pour placer les étudiants en stages. Déjà que ce n’est pas facile de trouver des milieux de stage, en trouver qui acceptent les étudiants en temps de COVID, c’est un tout autre défi. »

« Nous avons appris récemment que le Collège embauchera l’équivalent de 6,38
nouveaux profs cet hiver. C’est bien, mais ce n’est clairement pas assez. La direction a confirmé un excédent budgétaire de 1,2 M$ récemment. Pourquoi ne pas affecter une partie de cette somme à l’embauche de plus de profs?
 », demande-t-elle. Par ailleurs, les 6,38 nouveaux enseignants qui se grefferont au corps professoral cet hiver seront affectés à des tâches
 choisies par la direction. « Nous n’avons pas été consultés pour connaître où se trouvent les besoins. »

« En plus de l’excédent budgétaire de 1,2 M, actuellement, le Collège de
Valleyfield dispose aussi d’une réserve monétaire accumulée qui permettrait
l’embauche de six profs, mais la direction refuse d’aller au-delà de trois pour la
prochaine session
 », soutien Mme Malouin.

Elle craint que si davantage de ressources humaines (profs) ne sont pas embauchées en prévision de la prochaine session, la situation actuelle empire. « Ça fait plusieurs années que je suis dans le domaine et cette année, je vois davantage de profs qui démissionnent, qui se réorientent ou qui tombent en congé de maladie prolongé. Le gouvernement ne s’en préoccupe pas. Combien de fois avez-vous entendu des directives claires pour les cégeps depuis le début de la crise? On est laissés à nous-mêmes et il faut que ça change », conclut-elle.
 

Notons en terminant que le Collège de Valleyfield se dit sensible et conscient des
impacts engendrés par la gestion de la pandémie, tant sur les conditions de travail
des enseignants que les conditions d’apprentissage des étudiants. Pour connaître sa position dans ce dossier, consultez ce texte

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