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Harcèlement sexuel à la GRC: «des changements significatifs» sont nécessaires

durée 22h06
9 juin 2022
La Presse Canadienne, 2022
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2022

MONTRÉAL — Selon les évaluatrices indépendantes derrière un rapport portant sur le harcèlement sexuel et la discrimination vécus à la Gendarmerie royale du Canada, «la GRC nécessite des changements significatifs, et cela, dans les meilleurs délais». Elles ont rendu public jeudi leur rapport final relativement au recours collectif Tiller, Copland et Roach.

Les évaluatrices ont analysé plus de 400 réclamations concernant des femmes qui ont travaillé ou fait du bénévolat à la GRC. Elles ont subi des actes de harcèlement sexuel, de misogynie, d’homophobie et d’agression sexuelle commis par des membres de l’organisation entre 1974 et 2019.

Le rapport fait suite à l'action collective intentée par Cheryl Tiller, Mary-Ellen Copland et Dayna Roach en novembre 2017 contre le Canada. Elles alléguaient que la GRC n’avait pas pris de mesures raisonnables pour s’assurer que des femmes œuvrant dans des milieux de travail contrôlés par la GRC — mais qui n’étaient pas des membres de la GRC ni ses employées — puissent travailler dans un environnement exempt de harcèlement et de discrimination.

En juin 2019, un accord a été conclu visant à régler les réclamations pour un total de plus de 20 millions $. Les actes ont néanmoins pesé lourdement sur les victimes, qui ont des profils très variés, et leurs familles.

«La culture, dans les mieux de travail de la GRC, tolérait la misogynie, l’homophobie et une gamme d’autres préjudices et d’inconduites fortement répréhensibles dans ses rangs et au sein de sa direction», peut-on lire dans les observations des évaluatrices.

Les réclamantes ont notamment été victimes de commentaires vulgaires et de railleries à propos de leur corps, de commentaires à caractère sexuel sur leur habillement, d’attouchements non désirés, d’accès non autorisé à leurs renseignements personnels et d’utilisation à des fins inappropriées ainsi que d’insultes ciblant leur race, leur origine ethnique, leur identité autochtone, leur orientation sexuelle ou leur handicap.

«L’attitude trop fréquente était que les femmes se trouvaient au travail aux fins d’amusement et de gratification sexuelle des membres hommes», observent également les évaluatrices.

Au-delà «des effets négatifs en cascade sur les réclamantes», «la GRC a subi des pertes organisationnelles inestimables, notamment la perte de travailleuses compétentes et expérimentées, une diminution de la productivité, de l’absentéisme ainsi qu’une démoralisation», ajoutent-elles.

Les évaluatrices ont soumis une série de sept recommandations dans leur rapport de 222 pages. Elles conseillent notamment de «reconnaître, examiner, établir et rectifier les obstacles systémiques qui perpétuent et prolongent le harcèlement non signalé et non résolu dont sont victimes les femmes dans les milieux de travail de la GRC».

Elles recommandent également de revoir le processus de traitement des plaintes, entre autres en prévoyant un facilitateur chargé d’accompagner les éventuelles plaignantes.

La commissaire de la GRC, Brenda Lucki, reconnaît que «les comportements décrits dans ce rapport sont inexcusables».

Dans une déclaration, elle indique être plus que jamais déterminée à améliorer la culture de la GRC et à agir sur plusieurs fronts.

«Nous avons la ferme intention de faire en sorte que les auteurs d’inconduite soient tenus responsables de leurs actes», ajoute-t-elle.

Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, s’est quant à lui dit déterminé «à changer la culture, à aider tout le monde à se sentir en sécurité et à faire en sorte que la GRC reflète vraiment les valeurs du pays qu’elle sert».

Le ministre admet que le rapport met en évidence ce que des survivantes et des défenseurs des droits de la personne disent depuis longtemps, c’est-à-dire qu’il existe une culture tolérant les inégalités systémiques au sein de la GRC.

«Il n’y a absolument aucune place pour la misogynie, le harcèlement ou la violence au sein de la GRC ou de la société canadienne. Malheureusement, nous ne pouvons pas dire que cette norme de base a toujours été respectée», souligne-t-il.

En novembre 2020, le «rapport Merlo», publié par l’ancien juge à la Cour suprême du Canada Michel Bastarache, faisait état de comportements similaires subis par les membres femmes et des employées de la GRC.

Johanna Pellus, La Presse Canadienne